Voilà maintenant plus d’un mois que le nouveau centre commercial est ouvert. Le premier bilan ne fait que confirmer nos analyses et nos craintes. L’ensemble, disproportionné, n’est pas d’abord conçu pour les besoins du quartier, mais bien plutôt contre lui, contre notre environnement, nos équipements. Ceux qui parmi nous espéraient le rétablissement du cinéma disparu ont pu constater le prix de l’entrée à 14,50 euros …
L’inauguration officielle, le 23 octobre, l’a vérifié. Riverains, nous avons été soigneusement écartés de la cérémonie somptuaire pour laquelle promoteurs, enseignes et élus ont bloqué la rue Linois et écoulé des hectolitres de champagne avant de laisser venir le vulgum pecus.
Mais les réalités sont têtues. Notre rassemblement devant le Monoprix a, pour une fois, été relayé par les media – Le Parisien, France 3. Les problèmes et questions que nous posons sont inévitables, surtout dans cette période de campagne des élections municipales.
Le 29 novembre, une dépêche est venue confirmer la vente imminente du centre, à peine ouvert, par le promoteur Gecina à un fonds chinois, SAFE (China’s State Administration Of Foreign Exchange), pour 700 millions d’euros. Les Chinois veulent diversifier leur portefeuille d’investissements dans le monde. La pleine propriété des terrains en Front de Seine concédée par la Ville de Paris, à proximité prestigieuse de la Tour Eiffel les garantit contre un retournement de conjoncture. Gécina s’apprête à réaliser une « culbute » extraordinaire… grâce à la municipalité de Paris. Riverains, contribuables parisiens, devons-nous en faire les frais ? Non !
Faisons simplement parler les chiffres : 700 millions, cela représente 45 fois plus que le montant des droits à construire cédés par la Ville à Gécina. Autrement dit, cela représente pas loin de mille ans de loyer de l’ancien Centre médical Beaugrenelle détruit en 2006.
Reprenons nos revendications une par une ! D’abord, l’immédiat.
Les abords du centre nécessitent de sérieux ajustements. Notre intervention a déjà contribué à faire reculer le gestionnaire du site. Sous notre pression, il a concédé l’arrêt des souffleries, seulement la nuit, qui expulsent l’air surchargé, entraînant une nuisance sonore sur toute la façade de la Tour Keller. Il a diminué les éclairages intempestifs. Il aurait pu y penser avant.
Nous réclamons un filtrage des fumées de cuisines des restaurants situés, dans l’ilot Verseau, sous du Novotel, difficiles à supporter aujourd’hui par les riverains les plus proches, intolérables quand les chaleurs reviendront (Beaugrenelle ou Beaugraillon ?).
Pour les livraisons, il n’est pas question pour nous que les choses continuent comme ça. Les quais de livraisons, en bas de la rue de l’Ingénieur Keller, sont quasiment inutilisés. Des portails restent ouverts toute la journée contrairement aux engagements pris. En revanche, rue Linois, il ne devait pas y avoir de livraison ! En fait, les 40 tonnes se stationnent comme ils peuvent sur les « refuges », là où déjà des véhicules en transit, des cars de tourisme essaient aussi de s’arrêter. Klaxon toute la journée ! Tout cela doit changer. Le responsable du centre, que nous avons rencontré en délégation le 30 novembre, nous a écoutés. Il doit nous entendre !
Circulation, parking, transports : l’engorgement prévisible se produit. Le week-end, c’est intenable.
Plus personne, même Mme Hidalgo n’ose prétendre que le centre commercial répond avant tout à des besoins de proximité. Les dépliants publicitaires ont été diffusés jusqu’à de lointaines banlieues sud et ouest. Les touristes, notamment chinois, sont ouvertement ciblés (luxe).
Les trottoirs sont engorgés le week-end bouleversant les rythmes de vie des riverains. Evidemment, la masse des visiteurs ne vient pas en vélib !
Le gestionnaire avait annoncé 1100 places de parking réservées, payantes – chères – au centre. En réalité, il n’y en a que 669 (et rien pour les 2 roues – les motos sont sur les trottoirs). C’est clairement insuffisant d’autant que 200 places en surfaces, rue Linois, rue Robert de Flers et rue de l’Ingénieur Keller, ont été supprimées et d’autant plus que les parkings sont bloqués le samedi faute de sortie praticable sur la contre-allée des quais.
Résultat : de nombreuses autos tournent en maraude dans les rues avoisinantes. Pour les riverains, le stationnement, voire la mobilité, est rendu plus difficile. Les objectifs « écologiques » de la municipalité – moins de gaz d’échappement – sont contredits.
Nous demandons l’aménagement de la sortie des parkings. Nous refusons catégoriquement tout transfert des parkings résidentiels restants, sous l’ilot Charles Michels et sous la dalle vers le centre commercial.
L’engorgement prévisible a les effets prévus pour les transports publics aussi.
La station Charles Michels et la ligne 10 en général ne peuvent supporter l’afflux supplémentaire de visiteurs. Le passage vers les quais, dans la station elle-même, est trop étroit. De nombreux nouveaux voyageurs sont des touristes étrangers augmentant l’utilisation des automates. Les queues s’allongent devant les distributeurs obligeant les voyageurs munis de titre de transport à se faufiler dans la foule, les autres à perdre de précieuses minutes.
Aussi nous demandons à la Ville, au gestionnaire et au STIF de voir avec la RATP quelles sont les possibilités d’augmentation de la fréquence des rames. Nous demandons, vu l’afflux de visiteurs, provinciaux et étrangers, la réouverture d’un guichet d’information et de vente. Par ailleurs, l’exigence d’escaliers mécaniques est toujours aussi grande.
Pour les autres équipements publics, la situation n’est pas plus satisfaisante. Le bureau de poste, déjà bien trop exigu fait face à un nouveau flux d’usagers. Son extension, dont l’ex-PDG de la Poste reconnaissait la nécessité, doit être décidée. Pour le commissariat, les moyens humains ne sont pas au niveau d’un quartier recevant 20 millions de visiteurs. Il est fermé le week-end !
Il en va de même pour le rétablissement d’un centre de santé conventionné, sur la dalle, au moins similaire à l’ancien centre médical Beaugrenelle. La réponse que la municipalité sortante a faite en juillet à un vœu au Conseil de Paris ne tient
pas. Non, le centre de la rue Viala, préexistant, n’est pas en développement. Faute de moyens, sa réponse aux besoins des habitants de son quartier se dégrade. Oui, la demande est plus forte que jamais à Beaugrenelle. Oui, Mme Hidalgo s’était engagée personnellement le 8 février 2006 à rétablir un centre de santé équivalent lors de l’enquête publique pour le PLU.
Elle l’a fait dans un texte virulent à notre encontre que nous tenons à la disposition de tous tant il est mensonger. En juillet, nous avons interpelé les élus avec quelques bonnes réactions. Nous allons à nouveau porter cette question essen-
tielle à l’occasion des élections municipales.
Rappelons seulement : 700 millions d’euros dans les poches du promoteur Gécina après la revente du centre commercial au Fonds chinois SAFE. C’est l’équivalent de 1000 ans de location de l’ancien centre de santé Beaugrenelle…
La Sempariseine (ex-Semea15), la municipalité ont permis cette plus-value colossale. Les élus s’en laveraient les mains ? La Sem se désengagerait ?
Telle n’est pas, pour nous militants associatifs de terrain, notre conception de la politique !
Continuons le combat !